TikTok, Instagram ou encore Facebook demeurent des outils très intéressants pour les annonceurs et les marques. Selon les prévisions d’eMarketer/lnsider Intelligence, les annonceurs vont dépenser cette année 775 millions $US en marketing d’influence sur le service de diffusion vidéo TikTok, soit 11 millions $US de plus que sur Facebook. Avec des dépenses estimées à 2,2 milliards $US cette année, Instagram continue de devancer les autres plateformes.
Lors du Big Bang, l’événement annuel organisé par l’Association québécoise des technologies (AQT), David Alexandre Tanguay, associé et vice-président de l’agence Minimal, et Jean-Sébastien Giroux, qui a passé une bonne part de sa carrière dans des agences telles que Tink, Optimum et Cossette, fondateur de Substance – qu’il vient de quitter il y a un mois – et chargé de cours en maîtrise à l’Université de Sherbrooke, ont échangé sur l’importance des influenceurs en B2B (en français, commerce électronique interentreprises) et même en B2C (commerce électronique de détail).
« En B2C, le marketing d’influence fonctionne encore très bien, souligne-t-il. Il demeure un levier très présent, mais on est assis sur une branche, la confiance. »
Jean-Sébastien Giroux a compris très rapidement que le contenu numérique ne serait pas juste une mode ; chez Substance, 5 à 6 personnes s’en occupaient à temps plein. En revanche, rappelle David Alexandre Tanguay, les influenceurs ont parfois mauvaise presse, les utiliser serait-il un couteau à double tranchant ? On aime les détester, s’amuse à dire Jean-Sébastien Giroux. On pense à la carte prépayée avec laquelle PO Beaudoin avait essayé de payer un taxi qui l’avait rendu la risée du Web, ou d’une autre influenceuse qui vapotait lors d’un vol vers le sud.
« Oui, il s’agit d’un couteau à double tranchant, mais seulement dans 5 % des cas, répond-il. Il existe un biais de perception. Cela ne fonctionne pas très bien quand il y a un manque d’expertise et de réelle volonté corporative. »
Les influenceurs demeurent des êtres humains qui peuvent être faillibles, ce qui peut être dangereux, le chargé de cours de l’Université de Sherbrooke donnant en exemple Guillaume Lemay-Thivierge et Hyundai. Le constructeur de voitures avait mis fin au contrat de l’acteur après que celui-ci ait annoncé ne pas être vacciné en pleine pandémie.
« Le choix de l’influenceur demeure très important, souligne-t-il. Il faut aussi que l’annonceur accepte une certaine part de risque, puisque certains influenceurs s’avèrent plus edgy. » Alors qu’il travaillait pour la marque Coca Cola, il a dû passer pas mal de temps à étudier les messages des influenceurs pour en trouver un sans trop d’aspérité. Pour l’anecdote, c’est Jean-Sébastien Giroux qui était derrière la carte prépayée de PO Beaudoin. « C’est vrai, reconnaît-il. Mais la campagne de Coke a été un super succès. Jusque-là, Pepsi dominait dans les marchés en Afghanistan, à Cuba et au Québec. Coke a repris la première place après 25 ans de domination de Pepsi au Québec. »
Étonnement, 95 % des gens font confiance à des personnes qu’ils ne connaissent pas plutôt qu’à une marque qu’ils connaissent pourtant, révèle David Alexandre Tanguay. « Si on regarde les buts atteints, on observe que 72 % des marques ont augmenté leur notoriété ; 88 % ont amélioré leur réputation et 41 % ont généré des prospects. » Dans le cas du B2B, il est possible de travailler avec des micro-influenceurs nichés. Il faut faire la différence entre les leaders d’opinion et les experts de l’industrie, met en garde Jean-Sébastien Giroux. Les experts ont une capacité à produire du contenu d’impact, ce qui n’est pas donné à tout le monde en agence.
« Dans le meilleur des mondes, le président ou le VP au marketing devrait produire le contenu, mais il faut aussi savoir le faire, nuance-t-il. Et les experts dans les murs des entreprises devraient en faire partie. »
Les deux conférenciers citent à ce sujet la plateforme de communication collaborative Slack, qui a connu une courbe ascendante phénoménale grâce à des influenceurs. D’ailleurs, Slack a été vendu pour 27 millions $US à Salesforce en décembre 2020. Pas mal pour une jeune pousse partie de rien. Il faut dire que lorsque les directeurs financiers et les directeurs du marketing ont adopté la plateforme, le mot s’est répandu comme une traînée de poudre. La réussite de la marque tient à la fois du produit lui-même que des influenceurs.
En marketing d’influence dans le B2B, le modèle de conversion passe par cinq éléments : la notoriété, la considération, la conversion, la rétention et la fidélité.
« L’entonnoir reste valide, souligne Jean-Sébastien Giroux. Mais tout passe par une première chose, une analyse de rentabilité. Dans le reste du Canada et aux États-Unis, il ne s’agit pas de savoir si on le fait, mais combien on en fait, dit-il. Le Québec se trouve très en retard. En B2C, le marché reste saturé, mais pas en B2B. Il faut se demander si vous avez les compétences et le temps à l’interne. Sinon, il faut trouver un budget pour faire travailler avec une agence. »
Les deux experts y vont de leurs conseils pour réussir sa campagne de marketing d’influence B2B. D’abord, LinkedIn et Instagram demeurent les deux plateformes de prédilection. Il ne faut pas, non plus, bouder les webinaires gratuits le midi avec un expert de renom en échange de courriels et de données consentis. On peut aussi organiser des lunch and learn, dont on peut découper le contenu en morceaux pour le réutiliser.